Mercredi 17 novembre 2066: Étienne, la forêt un commun

Quelle fête hier ! Quelle joie de voir ce village si vivant ! Ce matin nous avons reçu un nouveau legs au commun de la forêt. C’est un vrai symbole. M. Gautier, un citoyen du village, l’a fait de son vivant alors qu’il s’était opposé becs et ongles à la construction de notre première Agora.


Il s’était finalement retrouvé seul face aux habitants. Jamais il n’avait été rejeté. Pendant des années, les gens l’avaient invité à y venir. Il avait finalement participé à la construction de la nouvelle Agora. Il avait beaucoup contribué à la construction grâce à son expertise. Les gens ne lui avaient fait aucun reproche, aucune remarque. Ils l’avaient simplement accueilli avec joie.

Depuis plusieurs années, des villageois, au moment de décéder, lèguent leurs forêts à la coopérative d'intérêt collectif forestière (SCIC forestière). Ce n’était pas une volonté politique, mais la volonté de particuliers de contribuer à la constitution de communs, d'éviter le morcellement des forêts et d'avoir une meilleure gestion du patrimoine forestier local. La réappropriation de ces communs par les villages permet maintenant d’avoir une meilleure cohérence dans la gestion de la forêt. Les rapports de force se sont inversés avec les scieries, les exportateurs de bois. La coopérative a développé plusieurs circuits courts: suivi des forêts, sécurité face aux incendies, bûcheronnage, chauffage des bâtiments, bois de construction, bâtiments ossature bois, menuiserie, construction de serres semi-enterrées, centre de formation. La SCIC permet de garantir que les bénéfices sont réintégrés dans l'activité. Cela consolide la coopérative. Les activités diverses permettent de s'adapter aux aléas du marché (feux, tempêtes, gros chantiers, changement d'essences d'arbre, etc.). La gouvernance est ce qui a été compliqué au début, mais maintenant le fonctionnement de la SCIC est comme une danse. Les personnes changent souvent de rôle en fonction des besoins et de leurs aspirations. Nous n'hésitons pas à suspendre ou à arrêter certaines activités. Certains coopérateurs proposent des initiatives qui deviennent de nouvelles activités à part entière. C'est le cas de la menuiserie qui avait commencé comme une expérimentation.

Le paiement en monnaie locale permet de soutenir la filière et de garantir que les investissements bénéficient à l'activité locale. Les anciennes usines ont trouvé une seconde vie. Fini le temps de l’exploitation forestière de l’« industrie » du bois ! Quand j'y pense, je me demande comment les anciens ont pu utiliser ce terme. Ça me fait froid dans le dos. Sans renier le passé, nous sommes revenus à des actions de bon sens par des gens proches du terrain. Les villages prennent soin de leur bien commun et ont à cœur d’en prendre soin pour les générations futures.

Jean-Christophe LÉONARD
17 novembre, 2021
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